Voyage aux pays volcaniques du Vivarais

Docteur Francus

- Albin Mazon -

XI

La fontaine du Vernet

Le banc de gneiss schisteux de la Levade. – Les grands parents du salicylate de soude. – Les chiens médecins. – Le bassin houiller de Prades. – La source du Vernet. – La Lyonnaise. – Quelques réflexions sur les eaux minérales en général. – Variété du dosage alcalin dans les eaux minérales de l’Ardèche. – Pourquoi l’usage des eaux minérales, inutile autrefois, est devenu aujourd’hui une nécessité. – Comment se fait la tisane de granit. – La source unique de nos eaux minérales et la cause de leurs différences.

Mon compagnon de voyage me fit revenir du Pont de la Beaume à la Levade pour examiner, dans le lit de l’Ardèche, en face de ce village, un curieux phénomène géologique. C’est un banc de gneiss passant au micaschiste, avec veines de quartz et veines de granit à petit grains bien cristallisés. Ce banc est redressé et forme comme un barrage naturel, emporté par la rivière à l’endroit où elle a creusé son lit, et raviné, ébréché aux endroits où passent seulement les grandes crues. A ses veines contournées on dirait du bois de noyer. Les grés houillers sont à côté.

En dix pas, on peut mesurer trois grandes époques qui correspondent à un nombre incalculable d’années.

Allez, par une belle matinée d’été, vous asseoir sur ce banc, jeunes gens qui cherchez des impressions : vous entendrez d’un côté le murmure de la rivière, et de l’autre le gargouillement des oiseaux dans les arbres voisins ; vous prêterez l’oreille au bruissement des insectes et à la rumeur éloignée des voix humaines, en songeant à l’infinie petitesse où le grand spectacle de la nature réduit les hommes comme les insectes. De là, concentrant votre pensée sur le gneiss schisteux où vous êtes assis, vous obligerez cette pierre à vous raconter ses aventures, et pourrez ainsi laisser monter votre esprit à des hauteurs où les découvertes intéressantes ne lui manqueront pas et où, dans tous les cas, il trouvera des raisons de prendre en pitié nos petites préoccupations du jour.

Nous revenons sur la grand’ route en traversant des prés où la spirée ulmaire, mieux nommée la Reine des Prés, avec ses belles panicules blanches, se joue au pied des saules. Qui se doutait, avant ces derniers temps, que ces deux végétaux fussent de grands médecins et qu’un jour la chimie tirerait de leurs entrailles un puissant spécifique contre la goutte, le rhumatisme et la gravelle ? Car, je suis bien aise de le dire en passant à ceux de mes lecteurs qui pourraient l’ignorer, le salicylate de soude est réellement un remède des plus sérieux contre les maladies que je viens de nommer. Or, le principe actif de cette substance qu’on prépare aujourd’hui avec l’acide phénique, avait été extrait d’abord du saule et de la Reine des prés. Qui sait si, bien longtemps avant les chimistes, l’expérience populaire n’avait pas découvert la vertu cachée dans ces deux enfants des terrains humides ?

Beaucoup de mes confrères se moquent des recettes de bonnes femmes, et ils n’ont certainement pas toujours tort. J’en fais autant, mais avec plus de réserve, et en cherchant toujours si ce que nous prenons pour une pratique insensée ou même dangereuse n’a pas une origine sérieuse. Il ne faut pas oublier que la médecine a commencé par les remèdes de bonnes femmes, c’est-à-dire par tout ce qu’il y a de plus naïf et de plus superficiel dans l’empirisme populaire. Il ne faut pas oublier non plus que les bêtes – qui n’ont jamais fait cour cours de médecine – en savent sur bien des points encore plus long que nos meilleurs praticiens, et que les chiens malades, mis dans un pré, vont tout droit aux plantes qui peuvent les guérir. Les chiens n’ont guère la goutte et la gravelle ; sans cela, je suis sûr qu’ils nous auraient enseigné depuis longtemps les vertus du saule et de la spirée ulmaire.


Les châtaigniers de la Levade sont les plus beaux de la contrée. Ils sont grands et droits comme des peupliers. Peut-être ne produisent-ils pas plus de fruits que les autres, mais certainement, ils n’ont pas leurs pareils, aux yeux des charpentiers.

Le petit bassin houiller de Prades repose sur le gneiss et se trouve entouré de tous les côtés par des montagnes granitiques. Il s’étend sous le sol des communes de Prades, Nieigles, St-Cirgues de Prades, Jaujac et va même jusqu’à la Souche. Sur plusieurs points, on voit la houille affleurer le sol.

Soulavie, qui n’avait pas sur la formation de la houille des idées aussi exactes qu’on les a aujourd’hui, dit dans son 2e volume de l’Histoire naturelle de la France Méridionale, que le dépôt houiller de Prades a été vomi, sous forme liquide, par le volcan de Jaujac. Il est vrai que dans le 8e volume, publié trois ou quatre ans après, il est déjà revenu à une opinion plus raisonnable, puisqu’il dit en propres termes : « C’est à nos antiques forêts que nous devons les amas de matières combustibles que recèle la terre. »

Le terrain du bassin de Prades est un de ceux que les soulèvements ont le plus bouleversé, ce qui n’est pas de nature, comme on le pense, à faciliter l’exploitation des mines et l’appréciation exacte de ce qu’elles referment. On évalue à 28 millions de tonnes la quantité de combustible qu’elles peuvent fournir, et c’est à ce chiffre, dont il faut désirer la confirmation, qui vaudra à ce pays la prolongation de l’embranchement ferré d’Aubenas.


Voici ce qu’écrivait en 1762 le prieur de Prades en réponse aux demandes de renseignements qui lui avaient été adressées par les auteurs de l’Histoire du Languedoc :

Prades (de Prata) appartient au prieuré royal de Charaïx que possède aujourd’hui l’évêque de Laon. L’église est accolée à la maison du curé d’un côté, et de l’autre à celle de M. le prieur où habitait anciennement une communauté de religieux de St-Augustin, dépendant de Charaïx.

A cent toises, se trouve un beau calvaire bâti depuis environ cent ans, par M. l’abbé de la Tourette prieur pour lors de Charaïx et résidant à Prades. Ce calvaire est célèbre par le nombre prodigieux de guérisons qui s’y opèrent le 14 septembre. Il y a des tableaux d’une belle peinture qui représente les prophètes et les apôtres. La sculpture y est également belle.

Cette paroisse est des terres de M. le comte d’Antraigues, dépendant pour la justice de la baronnie de Jaujac. On y trouve le château de Montreveux dans lequel réside l’ancienne famille de ce nom.

On y voit quelque petite mine de charbon de terre presque épuisée du côté le long du ruisseau et du grand chemin qui est la route du Gévaudan.

Le consul est ordinairement un paysan de l’endroit, illettré, que la communauté élit, quand il en est besoin, pour une délibération.

Le taux des impositions vient de la généralité de Montpellier et la distribution s’en fait sans injustice par le greffier : quant à la taille, sur tous les contribuables à proportion du fonds que chacun possède. Quant à la capitalisation, elle se règle sur les familles disponibles dans un bureau assemblé et payé pour cela, car la justice distributive n’est pas toujours la mieux observée et la protection y trouve quelquefois accès.


Le Vernet est un joli vallon vert à un kilomètre du village de Prades, non loin du volcan de Jaujac.

Des traces d’eau minérale s’aperçoivent sur divers points du gneiss plus ou moins décomposé par l’action successive des feux souterrains et de l’eau. Autrefois les paysans appelaient cela l’aïgo omaro (l’eau amère). On en buvait par curiosité. Il y a une dizaine d’année seulement, M. Tarendon, propriétaire des terrains de l’aïgo omaro, fît des fouilles et mit à jour la magnifique source du Vernet, l’une des plus remarquables du Vivarais, dans tous les cas la plus gazeuse, la plus agréable à boire et celle dont le rapide succès dans toute la région environnante dit assez haut le mérite.

La captation de la source une fois faite, l’eau devint plus gazeuse. Cela eut lieu en 1868. L’exploitation commença dès 1869. On vendit alors 21,000 bouteilles, la deuxième année 40,000. Aujourd’hui l’eau du Vernet se vend à raison de 80 à 100,000 bouteilles par an, ce qui est d’autant plus remarquable qu’on n’a fait pour elle aucun frais de publicité. Il est vrai que ses propriétaires, prenant le contre-pied de beaucoup d’autres marchands d’eau, n’ont pas cru nuire au prestige de leur marchandise en la cédant à un prix raisonnable et à la portée des petites bourses du pays (20 centimes la bouteille). A Aubenas, Joyeuse, Largentière et jusqu’à St-Ambroix et Alais, c’est l’eau de Vernet (1) qui tient incontestablement le haut bout dans la consommation locale.

La source du Vernet sort, à une centaine de mètres de la maison de son propriétaire M. Tarandon, d’un gneiss pourri et passant à l’état d’argile rougeâtre. Elle débite 5 litres à la minute. Sa température est de 12 degrés. Rien de plus agréable, de plus frais, de plus pétillant que cette eau prise à la source. C’est un vrai champagne, et, pour ma part, je le préfère à tous les Cliquot du monde.

On a remarqué que, lorsque souffle le vent du Midi, l’eau du Vernet est moins gazeuse et a une saveur moins piquante ; aussi se garde-t-on de la mettre en bouteille à ces moments là. Il paraît que la même observation a été faite pour la plupart des sources minérales.

A 200 ou 300 mètres de là est une autre source appelée la Lyonnaise, dont l’eau a une grande analogie avec celle du Vernet (2).

Ces sources ne sont qu’à un kilomètre de la route de Jaujac et à 3 kilomètres de la Levade, où doit aboutir prochainement l’embranchement du chemin de fer. Quand cette section sera ouverte, le Vernet et la Lyonnaise seront dans des conditions d’exploitation beaucoup plus avantageuses et l’on peut s’attendre à voir doubler ou tripler très-rapidement le débit de leurs eaux.

La distance de Vals à Prades n’est de que cinq kilomètres.


On me permettra de placer ici quelques réflexions sur les eaux minérales en général.

Je ne trouve rien de si sot – qu’on me pardonne l’expression – que les jugements absolus et d’emblée qu’on entend à chaque instant porter à propos des eaux minérales.

Il en est de ces eaux comme des formes de gouvernement. Aucune n’est absolument bonne ni absolument mauvaise. Ou, si l’on veut, toutes sont bonnes, appliquées à propos, et beaucoup sont mauvaises appliquées sans raison et de travers.

Permis aux propriétaires de sources de battre la grosse caisse dans leur prospectus et d’assurer que leurs eaux – pas celles du voisin par exemple – guérissent toutes les maladies. C’est une faiblesse humaine bien naturelle, et je craindrais, si j’étais à leur place, d’en faire autant.

Or, par-dessus les prospectus des marchands ou propriétaires de sources minérales ; par-dessus même les conseils des médecins qui, souvent à leur insu, se laissent guider dans le choix des eaux par des considérations plus ou moins intéressées, il y la science et le bon sens qui déclarent :

1e Que l’emploi des eaux minérales mérite la plus grande attention et qu’il doit être soigneusement approprié aux tempéraments et à d’autres circonstances ;

2e Que même avec ces conditions remplies, les meilleures eaux peuvent être impuissantes ou nuisibles si le malade ne veut pas y mettre du sien pour assumer leur effet ;

3e Qu’il doit suivre conséquemment un régime déterminé, dont la tempérance en toutes choses, l’exercice du corps et le repos de l’esprit, sont ordinairement les éléments principaux ;

4e Que dans une infinité de cas, les eaux portent la faute des écarts du malade ;

5e Que, par contre, on leur fait bien souvent l’honneur de cures qui ne sont que l’effet de la distraction, du changement d’air, du séjour dans un pays nouveau, du repos, de l’oubli des occupations habituelles, d’un genre de vie tout nouveau, etc.

Avant de crier contre les eaux ou contre le médecin, les malades doivent faire leur examen de conscience. Combien en voit-on chaque année qui, tout en souffrant de l’estomac, de la vessie ou de la poitrine, semblent être venus aux eaux encore plus pour s’amuser que pour se soigner ! Ils s’imaginent que, pourvu qu’ils boivent les verres d’eau et prennent les bains réglementaires, le bon Dieu est obligé de faire le reste. Les bons restaurateurs qui, malheureusement affluent à toutes les stations d’eau, ajoutent encore aux difficultés de la cure. On dirait que le diable les a mis là tout exprès pour empêcher l’effet des eaux. Ma conviction est que les bons dîners abrègent la vie autant que les privations, et fournissent beaucoup plus de clients aux médecins.


Les eaux du Vernet appartiennent, comme on l’a vu par l’analyse, à la catégorie des bicarbonatées sodiques qui comprend la St-Jean, la Marie, la Vivaraise n°1, et généralement toutes les eaux qu’une faible dose de bicarbonate de soude accompagnée d’une forte dose de gaz permet de ranger parmi les eaux de table – ce qui n’exclut pas, d’ailleurs, leurs vertus médicinales sur lesquelles l’expérience seule peut prononcer.

J’ignore les vertus spécifiques de l’eau du Vernet, mais je suis convaincu qu’elle n’est inférieure à aucune des sources de la même classe, et je désire qu’elle soit promptement sous ce rapport l’objet d’observations sérieuses et suivies. D’après des témoignages nombreux, on peut dire d’ores et déjà qu’elle est essentiellement digestive. J’ajoute qu’elle passe pour avoir opéré des merveilles contre la goutte, la gravelle, l’anémie et quelques-unes des indispositions particulières au sexe faible.

L’emploi des eaux minérales étant une médecine essentiellement homœopatique au moins au point de vue de la division infinitésimale des substances qui les composent, les eaux les plus faiblement dosées ne sont pas les moins précieuses, parce qu’elles peuvent être utilisées dans un beaucoup plus grand nombre de cas. Les eaux du Vernet ou de la St-Jean sont, par exemple, à la Rigolette ou à la Madeleine ce que les sous sont à une pièce de cinquante centimes. Or, tout le monde sait que, si l’on peut être parfois embarrassé avec une pièce de cinquante centimes, on ne l’est jamais quand on a cette même somme en sous, car on peut ainsi en graduer l’emploi à volonté. C’est cette graduation des doses dans les eaux de l’Ardèche, cette sorte de gamme alcaline, allant d’un demi-gramme à 7 ou 8 grammes par litre qui constitue leur véritable supériorité sur les eaux de Vichy, lesquelles présentent toutes ou presque toutes une dose uniforme de 4 à 5 grammes de bicarbonate de soude par litre. Nos félicitations en passant à la compagnie des Vivaraises qui, par son ingénieuse classification, a fait la lumière dans le chaos des noms de sources et a mis à chacune des siennes un numéro qui apprend au médecin ce qu’il est avant tout essentiel de savoir, c’est-à-dire leur dose de bicarbonate de soude.


Les vices nouveaux entraînent des maladies nouvelles auxquelles il faut chercher naturellement des remèdes nouveaux.

Autrefois on vivait plus simplement qu’aujourd’hui. Il y avait moins de cuisiniers pour déranger les estomacs, moins de journaux politiques pour faire tourner les têtes. On vivait paisiblement chez soi, se succédant de père en fils dans la culture du patrimoine paternel ou dans l’exercice de la profession adoptée de temps immémorial par la famille. Tout le monde ne voulait pas être maire ou conseiller municipal ; il y avait moins d’avocats et de journalistes, et l’on ne voyait pas les plus minces d’entre eux candidats stéréotypés aux fonctions de député ou de ministre. Il y avait moins d’ambition et moins de mauvaises digestions.

Aujourd’hui tout va de travers dans la santé du corps social comme dans celle des individus.

La première est atteinte de deux terribles fléaux, le scepticisme et la politicomanie, dont un seul suffirait à tuer la nation la plus vivace, et la seconde souffre du développement des plus terribles maladies de l’espèce humaine, toutes, malgré la diversité de leurs manifestations, provenant d’une source unique : l’oubli des lois divines et naturelles.

Les eaux minérales, autrefois inutiles, sont devenues une nécessité et il a fallu leur demander, soit les alcalins, soit le fer destinés à aider au rétablissement de l’équilibre entre les éléments naturels du sang ; mais si les eaux minérales sont, en certains cas, un précieux adjuvant, les malades ne doivent pas oublier qu’un retour durable à la santé ne peut être que la conséquence d’un changement de régime ou de conduite, c’est-à-dire de la suppression des causes qui ont déterminé la maladie.


J’ai déjà constaté plus haut que la roche d’où sort l’eau minérale du Vernet est un gneiss en pleine décomposition, un gneiss qui semble avoir été cuit par les volcans et préparé à point pour fournir à l’eau qui le traverse ses principes minéralisateurs.

Les sources de Jaujac, du Pestrin, de Marcols, des Escourgeades (près d’Antraigues) et beaucoup d’autres sont dans les mêmes conditions d’émergence. A Vals, les eaux sortent d’un granit feldspathique, dit leptinite, avec veines de schiste et de quartz, qui forme une bande non interrompue de Meyras à Vals et jusqu’à St-Andéol-de-Bourlenc. Au contraire, quand les eaux sortent d’un granit très-dur, comme au Régal (près d’Antraigues), elles sont ordinairement moins gazeuses.

On risquerait fort de se tromper cependant si on jugeait des eaux minérales uniquement par les roches qui constituent leur point d’émergence. Les sources de ce genre ne sont pas dans les conditions des sources ordinaires. Celles-ci peuvent être comparées à un filtre-entonnoir dont la grande ouverture est représentée par toute la surface des terrains qui reçoivent ou absorbent l’eau des pluies, et la petite ouverture, par la source où toute cette eau vient aboutir par une foule de petits affluents souterrains. Dans ce cas, le nombre et l’abondance des sources est naturellement en raison directe de la surface récipiente et de la quantité d’eaux qu’elle reçoit.

Il est à présumer que les eaux minérales viennent de plus loin. Dans tous les cas, la parfaite dissolution des substances qui les composent ne permet pas de douter de la profondeur du laboratoire où elles sont fabriquées. Ce sont des tisanes de granit, chauffées au grand foyer souterrain, c’est-à-dire à une chaleur incommensurable. Elles nous arrivent tantôt encore chaudes comme à St-Laurent, malgré l’énorme distance du point d’origine, tantôt tièdes comme à Neyrac et à St-Georges, tantôt enfin froides comme au Vernet et à Vals.

Il est à remarquer que ces sources abondent précisément dans les contrées où se sont produites les grandes fractures du globe et les anciennes éruptions. On conçoit parfaitement, en effet, que les eaux pluviales, ramassées dans le sous-sol, trouvent plus aisément dans ces régions non seulement plus d’éléments de minéralisation, mais encore une voie vers les parties profondes de la terre où la chaleur opère, en quelques instants, des combinaisons qui autrement demanderaient des siècles pour s’effectuer.

Nous pensons que, comme à Vichy, toutes les sources minérales qui sourdent de l’intérieur ou des environs de la grande fracture observée par M. Dalmas de Lavoulte jusqu’à Neyrac par Celles, Flaviac, l’Escrinet, St-Andéol de Vals (3), proviennent d’une nappe souterraine unique perpétuellement alimentée par les eaux pluviales tombées au sommet des crêtes cévenoles, descendant à de grandes profondeurs, grâce aux failles et conduits naturels résultants des anciennes fractures du sol, et allant sortir dans les basses vallées granitiques ou schisteuses par une foule d’issues différentes, en empruntant aux terrains qu’elles traversent de nouveaux éléments de minéralisation. La variété de composition de nos sources, plus grande qu’à Vichy, provient précisément de ce que leurs conduits naturels, ceux qui mettent en communication le grand bassin souterrain avec les divers points d’émergence, sont plus espacés et plus longs qu’à Vichy, où toutes les sources paraissent mélangées à quelques centaines de mètres de profondeur et ne présentent, par suite, que des différences insignifiantes.

  1. Analyse, faite par M. Joseph de Montgolfier, d’un litre d’eau du Vernet :

    Gaz acide carbonique libre . . . . . . . . .  2.5800
    Bicarbonate de soude . . . . . . . . . . . .  0.9993
         ----      potasse . . . . . . . . . . .  0.1083
         ----      lithine . . . . . . . . . . .  0.0040
         ----      chaux . . . . . . . . . . . .  0.3184
         ----      magnésie  . . . . . . . . . .  0.1573
    Protoxyde de fer . . . . . . . . . . . . . .  0.0089
         ----    manganèse . . . . . . . . . . .  traces
    Sulfate de soude (hydraté) . . . . . . . . .  0.0136
    Chlorure de sodium . . . . . . . . . . . . .  0.0097
    Arséniate de soude (hydraté) . . . . . . . .  0.0016
    Borate de soude  . . . . . . . . . . . . . .  traces
    Silice . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  0.0555
    Alumine  . . . . . . . . . . . . . . . . . .  traces
                                                 --------
          Total la richesse de la source . . . .  4.2566
    

    De plus, les sédiments renfermant des traces d’Arsenic, on peut conclure à la présence, en outre de l’Arséniate de soude, d’une très-faible trace d’Arséniate de fer.

  2. Voici l’Analyse d’un litre d’eau :

    Acide carbonique libre . . . . . . . . . . .  2 300
    Bicarbonate de soude . . . . . . . . . . . .  1 140
         ----      magnésie  . . . . . . . . . .  0 225
         ----      chaux . . . . . . . . . . . .  0 150
         ----      fer . . . . . . . . . . . . .  0 020
         ----      manganèse . . . . . . . . . .  0 002
    Chlorure de sodium . . . . . . . . . . . . .  0 115
      ----   de potassium  . . . . . . . . . . .  0 097
    Sulfate de soude . . . . . . . . . . . . . .  0 040
    Alumine  . . . . . . . . . . . . . . . . . .  traces
    Lithine  . . . . . . . . . . . . . . . . . .  traces
    Arséniate sodique  . . . . . . . . . . . . .  traces
    Matière organique  . . . . . . . . . . . . .  traces
                                                 --------
                                   Total . . . .  4 089
    
  3. Itinéraire du géologue et du naturaliste dans l’Ardèche, p. 201.