Meyras. – Le château de la Croisette. – La vallée de Montpezat. – Pourseille et Pourcheyrolles. – Les cardinaux Flandin. – Une découverte à faire. – Le paysage vivarois. – Auguste Bouchet. – Les points habités les plus élevés de l’arrondissement de Largentière. – Un filon de porphyre.
Près du pont Barrutel, à une demi-heure de Neyrac, on remarque une carrière, de 20 mètres d’épaisseur, de vaugnérite, roche éruptive qui semble formée de paillettes d’acier. Le portail de l’église de Meyras, ainsi que celui de la maison Giraud, sont construits avec cette pierre, qui est très-belle.
Il existe un autre filon de vaugnérite près de la chapelle Jau, commune de Rocher, près de Largentière. Les paysans en font des pierres à huile, et quelquefois des auges à porcs.
La pierre vaugnérite qui recouvre le portail de la maison Giraud à Meyras provient évidemment d’un monument funèbre, comme le prouve l’inscription qu’on peut encore y lire : In te Domine, speravi ; non confundar in œternum. – Angladius mihi formam dedit – Ætali suœ… Cette pierre a été apportée du château de la Croisette, qui était situé dans Meyras, et qu’il ne faut pas confondre, conséquemment, avec le château de Ventadour, dont nous avons visité les ruines au Pont-de-la-Beaume.
Le château de la Croisette fut détruit en 1626. Voici comment le fait est raconté dans les Commentaires du soldat du Vivarais :
« Sur le grand chemin du bas Vivarais en Auvergne était opposé le château de la Croisette, maison du sieur baron des Eperviers, rebelle, dans laquelle avait mis garnison, ce qui donnait de grandes appréhensions à la liberté de ce chemin et aux lieux circonvoisins catholiques, et notamment au lieu de Meyras, proche de deux mousquetades qui se piquetaient continuellement ; ce qui obligea les catholiques d’autour d’y entreprendre, desquels fut chef le sieur des Alras. S’étant ramassés de trois cents, ils investirent cette maison, lorsqu’ils eurent vu sortir une partie des soldats en campagne, où le combat fut très-bon, bien attaqué, par pétards, échelles et mantels, et bien défendu par douze ou quinze hommes qui étaient dedans, qui, enfin, furent forcés, après la résistance de tout un jour, et cette maison rasée en un instant jusques aux fondements. »
Quant au château de Ventadour, il attend encore son historien, et je n’ai rien trouvé nulle part de précis sur l’époque de sa destruction.
Le marquis de Chambonnas a acheté Ventadour qui a appartenu à sa famille, ainsi que le petit castel d’Hautségure.
Sur la route de Meyras à Champagne, on est frappé des tons blanchâtres du granit. C’est la leptinite, que les Allemands appellent weisstein ou pierre blanche, granit où le feld-spath domine et qui s’étend de Meyras à Vals et à St-Andéol-de-Bourlenc.
On descend de Meyras dans la jolie plaine de Champagne, plantée de châtaigniers, et reposant sur les basaltes. La végétation en cet endroit est admirable.
Les coulées de la Gravenne se sont répandues surtout au nord où elles ont formé le plateau basaltique qui supporte Champagne et Montpezat. Je dis plateau, quoi que ces localités soient situées au fond des vallées, parce que, d’autre part, elles dominent les immenses précipices que l’eau a creusés par le ravinement des basaltes.
Montpezat est blotti au fond de la vallée, comme encore effrayé des tempêtes de la Gravenne. Son effarouchement est, du reste, fort gracieusement drapé dans un paysage de prairies, de châtaigniers, de noyers et même de vignes et de mûriers. « Arrêtez-vous ici, semble-t-il dire, je suis le pied des montagnes (Montis Pes), et mon nom seul invite à s’arrêter avant de tenter le passage des Cévennes. Jules César passa chez moi, et voyez-vous ces deux pics qui se dressent sur ma tête : c’est entre eux que fila le conquérant romain avec son armée pour aller surprendre Vercingétorix. »
Et puis, comment passer à Montpezat sans y acheter un couteau ou des rasoirs ? La coutellerie de Montpezat était autrefois fort renommée, et elle l’est encore dans cette partie de la montagne. L’adoucissement des mœurs paraît avoir beaucoup nui au commerce des couteaux et vraiment il ne faut pas trop s’en plaindre. Autrefois, dans les cabarets de montagne, il n’était pas rare de voir nos padgels jouer ou boire ayant chacun son couteau, de bon acier de Montpezat, planté dans la table. Aujourd’hui cela se voit encore, mais par exception.
Comment passer aussi à Montpezat sans aller visiter le château de Pourcheyrolles, l’antique demeure du cardinal Flandin, que nous avons salué tout à l’heure en traversant le pont suspendu de Fontaulière ?
Ruine sur ruine, celle de l’homme sur celle de la nature, en attendant que toutes deux roulent dans l’abîme : voilà Pourcheyrolles.
Quand la Gravenne eut fait de la vallée de Fontaulière un lac de pierre fondue, et quand le lac fut refroidi, les éléments commencèrent leur tâche.
Deux rivières se précipitèrent sur Montpezat : Fontaulière et Pourseille.
Chacune fit peu à peu sa trouée dans la lave et le majestueux promontoire à angle aigu, formé à la jonction de leurs eaux, fut l’emplacement choisi par le cardinal Flandin pour y construire son château.
Le géologue anglais Poulett-Scrope dit en parlant de la vallée de Montpezat :
« Il est à remarquer que le vaste total de dénudation qui a eu lieu dans cette vallée, depuis qu’elle a été comblée de basalte liquide jusqu’au niveau du château de Pourcheyrolles, non-seulement à travers le basalte, mais encore jusqu’à une profondeur de plus de 50 mètres dans le granite sous-jacent (qui est d’une nature extrêmement compacte), n’a pu être effectué que par la force érosive des torrents qui y coulent actuellement ; puisqu’aucune violente éruption d’eau, soit déluge ou débâcle, n’aurait laissé intacts les deux cônes de scories incohérentes (les deux Gravennes). »
Il est certain que le château de Pourcheyrolles était une place forte des plus respectables, du temps où le chassepot était encore en germe dans nos vieilles arquebuses, du temps où la couleuvrine n’avait pas fait place au canon Krupp.
Accessible par un point seulement, point que dix hommes déterminés, abrités derrière les murs ou les rochers, pouvaient défendre contre une armée, Pourcheyrolles était une position tentante à ces époques de guerre civile, même pour tout autre qu’un cardinal. Pourcheyrolles n’en a pas moins été victime d’une de ces guerres, et, chose assez singulière, comme pour Ventadour, on ignore la date de sa destruction. On sait seulement qu’il y avait encore une garnison en 1519.
Pourcheyrolles est sans contredit un des points les plus pittoresques de l’Ardèche. Perché comme une aire de vautour, ou comme une sentinelle avancée, au milieu de la vallée de Montpezat, suspendu en quelque sorte au milieu des précipices, ce château est le type de ces vieilles demeures féodales dont le seigneur pouvait braver et défier toutes les attaques.
Deux fossés naturels d’une profondeur de cent mètres aux moins ont été creusés autour de lui par deux rivières que chaque pluie transforme en torrents impétueux : à droite, Fontaulière dont les eaux, en déchaussant de plus en plus son piédestal basaltique, le feront crouler quelque jour tout entier dans l’abîme ; à gauche, Pourseille et sa belle cascade où se jouent les hirondelles devant la grotte verte que l’eau masque à moitié de son rideau d’argent.
Quand la tempête gronde et que les deux torrents mugissent à la fois, comme si tous les éléments étaient ligués contre la vieille ruine, le spectacle est émouvant et Pourcheyrolles semble encore grandir au milieu de cette nature sauvage et déchaînée.
Mais silence ! Un bloc de basalte ou un pan de mur vient de rouler avec fracas dans l’abîme. C’est Pourcheyrolles qui envoie son Quos ego au torrent, mais en se détruisant lui-même.
La vie humaine est comme le vieux manoir du cardinal Flandin ; toutes ses victoires sont des triomphes à la Pyrrhus ; toutes ses manifestations de vie et de force sont un pas vers la tombe.
Le cardinal Pierre Flandin naquit à Borée, au flanc du Mézenc, en 1312. Il y fut créé cardinal en 1371 par le pape Grégoire XI qui l’avait employé dans diverses négociations difficiles et se préparait à lui confier une nonciature quand il mourut en 1378. Son tombeau, qui existait à Viviers, fut détruit par les protestants. Son neveu, Jean Flandin, après avoir été archevêque d’Auch, fut aussi créé cardinal en 1390 par le pape Clément VII. Ce choix de la vallée de Montpezat pour une villégiature de cardinal s’explique, dans une certaine mesure, par le fait de la résidence de la papauté à Avignon. Je gagerais volontiers néanmoins que les deux Flandin n’ont jamais fait de longs séjours au château de Pourcheyrolles.
Le château est, du reste, bâti dans des proportions fort modestes et, comme chez beaucoup d’hommes, son importance lui vient surtout de la position qu’il occupe.
Il n’y a qu’un corps de logis borné par des restants de tour. Toutes les voûtes étant écroulées, les deux ou trois étages qui le composaient se trouvent réduits à un seul avec le ciel pour toiture. Un sureau s’étale devant une cheminée tandis que de belles labiées couvrent le sol. Plus loin, les ronces font un treillage vert à une porte et lancent leurs rameaux épineux par la fenêtre ogivale voisine. Les armoiries des Flandin sont là haut, sculptées dans le mur, au milieu de ce qui était le premier étage, dominant tout ce pandemonium, et l’on aperçoit à côté une tête de pierre qui semble profondément étonnée du désordre pittoresque qui règne chez le cardinal.
La galerie du nord, tapissée de lierre, semée de genêts et de jasmins, conduit à une terrasse qui forme l’extrémité du promontoire et où l’on rencontre, non sans quelque surprise, un chêne hardiment penché sur l’abîme, et tout un frais bosquet de lilas ; le tout dominé par le volcan de la Gravenne, dont la gueule rouge, enflammée par le soleil couchant, semble toujours menacer la vallée.
Une jeune et romanesque Anglaise, amenée un jour en cet endroit, déclara qu’elle n’avait jamais, ni en Suisse, ni en Italie, rien vu de si poétique et de si beau, et qu’elle passerait volontiers sa vie en cet endroit. Le grave anglais qui l’accompagnait faillit acheter le domaine.
Quand on veut visiter Pourcheyrolles, il faut demander la clé à la ferme voisine, car, si le vieux château n’a plus ni toits ni fenêtres, il a encore une porte. Pour garder … quoi ? – les pierres de taille que des Vandales viennent enlever.
Une vaste pelouse, plantée de noyers et de mûriers, forme l’unique abord du château de Pourcheyrolles. Sur le rebord du précipice qui domine Fontaulière, tremblent des fougères et se dressent aventureusement des chênes. Les plus avisés parmi les oiseaux de la contrée vont nicher dans ses arbres, où personne n’oserait aller se risquer aux éblouissements de l’abîme.
M. Dalmas a trouvé sous les basaltes de Pourcheyrolles des genêts fossiles : c’est le genêt rabougri, gris et serré, qui sert aux toitures de la montagne. On le désigne dans le pays sous le nom de genêt redjondji, par opposition au genêt balan, qui sert à la confection des balais. Ce dernier, grand et vert, atteint et dépasse même la hauteur d’un homme.
Un pont en fil de fer a été hardiment jeté sur Fontaulière, un peu plus haut que Pourcheyrolles. Sa hauteur au-dessus du lit de la rivière et de 50 à 60 mètres. C’est, je crois, le plus élevé qui existe en France après le pont de la caille, situé sur la route d’Annecy à Genève.
Il y a une source minérale, entre Champagne et Montpezat, au bas de la Gravenne, mais nous ne l’avons pas visitée.
Avant de quitter Montpezat – car plus haut c’est l’Auvergne, plutôt que le Vivarais, – nous voudrions dire quelques mots de notre pays à un point de vue qui s’éloigne complètement de ceux qui nous ont particulièrement occupé jusqu’ici.
Le Vivarais a été plus ou moins étudié par les géologues, les historiens et les industriels, mais il est à découvrir au point de vue de l’art.
Le paysage vivarois n’a pas encore trouvé son Christophe Colomb, et cependant il y a là tout un monde à conquérir, monde fécond en beautés sauvages, et où pourra surtout se développer le génie de l’artiste qui aura le sentiment des contrastes et celui de la couleur.
La mode, aujourd’hui, et aux paysages verts et réguliers, à demi gazés et panachés de nuages gris, comme ceux de Corot.
Mais la mode, qui est capricieuse parce qu’elle est femme, est prête à s’éprendre des tons puissants, sauvages et tourmentés de la nature vivaroise, le jour où il se trouvera un artiste à la hauteur du sujet.
Montez, par exemple, sur le pic volcanique qui domine Neyrac, vous serez frappé de la grandeur et surtout de l’originalité du tableau qui se déroulera sous vos yeux.
Au premier abord, la scène est un peu confuse. L’œil n’est pas habitué à ces bizarres découpures de terrains, à ce mélange de terres noires, rouges et grises, piquetées de maisons blanches et coupées par les bandes vertes des prairies ou des bois de châtaigniers.
Tout cela danse un peu au regard du touriste à ahuri, – mais bientôt chaque chose se remet à sa place. L’œil et l’esprit ont été la dupe d’un faux désordre. L’harmonie, mais une harmonie sui generis, – une harmonie de langue étrangère, si l’on veut, – vous saisit l’œil, l’oreille et l’esprit.
Ces cônes rouges, verrues saignantes de la terre, avec leur ceinture de châtaigniers, dont la verdure claire tamise le soleil et dont les troncs semblent être en bronze florentin ; ces longues traînées de scories rouges et violettes qui descendent jusqu’à la rivière ; ces arbres qui pendent, échevelés, aux basaltes bruns, dont les majestueuses colonnades font la haie sur le passage de l’Ardèche ; la rivière, dont les rebondissements argentés font percevoir de loin les bruyantes cascades ; les maisons blanches, qui se détachent comme des figures humaines dans un médaillon vert de vignes et d’arbres fruitiers ; le mouvement des montagnes, qui semblent encore onduler à l’horizon et dont les arêtes noires écrivent leur nom dans le ciel bleu : tout cela vit, parle, sent, et celui qui saura transporter leur langage sur une toile aura ouvert au paysage une voie nouvelle et sera un grand peintre.
Voici ce que dit du paysage vivarois le géologue anglais que j’ai cité plus haut :
« Il serait peut-être difficile de rencontrer dans quelque autre chaîne de montagne des scènes offrant un mélange aussi heureux de beauté et de magnificence que dans quelques-unes des vallées du Bas-Vivarais si peu visitées par les amateurs du pittoresque. La riche verdure des forêts de châtaigniers, rehaussée par une atmosphère à la fois douce et brillante, est bien autrement favorable à la peinture que la couleur froide et transparente des Alpes et des Pyrénées avec leurs forêts de sapins et leurs cascades. Le profil des masses n’est guère inférieur en grandeur à celui de ces grandes chaînes. Le paysage est tout-à-fait celui des Apennins, mais avec un luxe de végétation que ne peuvent offrir les grandes chaînes calcaires. »
Le Vivarais n’est pas tout, du reste, dans les pays volcaniques. Les sujets ne manquent pas davantage dans les terrains calcaires et peut-être serait-il encore plus facile, avec les paysages vigoureux et chauds de ton de la basse Ardèche, de fixer sous le pinceau la poésie qui déborde partout du sol vivarois.
Un jeune peintre, dont il a été plus d’une fois question dans les journaux de l’Ardèche, me paraît dans les conditions pour tenter l’entreprise, parce qu’au talent et à l’activité, il joint un profond amour du pays natal.
J’ai vu, il n’y a pas bien longtemps, dans l’atelier d’Auguste Bouchet, quelques paysages où le caractère puissant, haut de ton et de couleur, de la nature vivaraise, est largement compris et exécuté. Ces paysages, qui ont été pris à Vals ou dans les environs d’Aubenas, réalisent les espérances qu’avait fait concevoir aux amateurs sa belle toile du camp de César, qui figurait au salon de 1869 et qui fut achetée 4,000 francs par l’Empereur pour le musée de Saint-Germain.
Auguste Bouchet a fait depuis plusieurs tableaux remarquables. Je me bornerai à citer la Paysanne napolitaine, achetée par M. Broët, Mahboul ou le fou arabe et la Prière dans le camp arabe au lever du soleil. Ces deux derniers figuraient au salon de 1877, et l’on peut dire qu’ils obtinrent le suffrage unanime des connaisseurs.
M. Bouchet a envoyé au Salon de cette année (1878) une toile, de grande dimension, où le ravissant paysage d’Aubenas et de ses environs, vu du côté de Fontbonne, est merveilleusement encadré dans un effet du matin. On croirait voir monter et s’évanouir, avec la rosée, les vapeurs blanches qui remplissent encore les replis nombreux de la montagne, tandis que le soleil caché derrière le vieux manoir d’Aubenas, effleure les pointes des rochers et des arbres et se mire déjà dans les eaux de l’Ardèche.
– Pourquoi, disions-nous un jour à Bouchet, ne cultivez-vous pas davantage le paysage vivarois ? Connaissez-vous un meilleur chemin pour arriver à la gloire et à la fortune ?
Il nous répondit un peu mélancoliquement :
– Je ne demanderais pas mieux que de m’adonner au paysage vivarois. Je dois même dire que ceux que vous voyez m’ont valu de précieux suffrages, car ce sont ceux de nos grands maîtres, les Baudry, les Fromentin, les Gérôme ; – mais … ça ne se vend pas. Les artistes sentent qu’il y a quelque chose là-dedans ; ce sont eux – eux presque seuls – qui regardent et apprécient ce genre de peinture. Mais le public ne saisit pas et n’achète rien.
– Il y viendra, répondis-je, comme il est venu aux Descamps et aux Delacroix qu’il n’appréciait pas mieux au début que vos paysages.
Reprenons notre promenade vers la montagne.
On a construit, depuis quelques années, une nouvelle route de Montpezat à Rieutort qui est infiniment préférable à l’ancienne. Celle-ci gravissait la montagne presque à pic par le col du Pal. L’autre serpente en s’élevant graduellement dans la vallée de Fontaulière à travers les bois de châtaigniers. Un peu plus haut les hêtres se mêlent aux châtaigniers. Puis les hêtres eux-mêmes disparaissent et nous voici dans un nouveau monde végétal. Il y a encore çà et là quelques chênes rabougris, des frênes, des noisetiers, des alisiers, mais le vulgum pecus de ces hautes régions est formé de bruyères et de genêts. Il y a aussi l’airelle myrtille qu’on ne voit guère au-dessous des altitudes de mille mètres.
Les toitures à genêts commencent. Une humble auberge devant laquelle nous passons en est couverte. Ces toitures durent une vingtaine d’années mais sont sujettes à de fréquentes réparations. Chaque maison de montagne est pourvue dans ce but d’une grande échelle.
En face de l’auberge est un toirier avec ses grappes de baies rouges qu’affectionnent les grives et les merles. Chaque montagnard plante à sa porte un ou plusieurs toiriers afin de pouvoir, de ses fenêtres mêmes, abattre les imprudents oiseaux qui viennent s’y percher.
Dans les prairies qui bordent Fontaulière, nous apercevons là-bas le Roux, tandis qu’au-dessus de nos têtes se dresse le clocher du Pal.
Le Pal est situé à une hauteur de 1,200 mètres. Tous les hivers la neige s’y amoncelle avec une sorte de fureur, et elle recouvre si bien les maisons que parfois on y reste une semaine sans voir le jour. Le Pal, les Usclades et le Cros-de-Géorand sont, dans ces régions, les points habités les plus élevés et ceux par suite où la saison d’hiver se fait sentir le plus rigoureusement.
Sur l’ancienne route, entre la nouvelle et le village du Pal, on trouve un beau filon de porphyre. Un dike pyroxénique, que l’on aperçoit plus loin de l’autre côté de Fontaulière, dans la direction du filon porphyrique, confirme l’hypothèse que les mêmes fractures de la croûte terrestre ont servi au passage des diverses roches éruptives.