Voyage humoristique, politique et philosophique au mont Pilat

Docteur Francus

- Albin Mazon -

V

Rochetaillée et les barrages du Pilat

Les routes du Pilat. – La vallée du Furens. – Le barrage de Rochetaillée. – Une lettre de Napoléon III en 1856. – L’hirondelle de rocher. – Le château de Rochetaillée. – Un guerrier amoureux. – Pourquoi le nuage monte et l’eau descend. – La nature et le bon Dieu.

Chabourdin nous quitta pour aller voir quelques clients.

Nous discutâmes, en son absence, les détails de la partie projetée.

Deux routes, presque parallèles, séparées par la vallée du Furens (ou Furand), partent de Saint-Etienne, dans la direction du mont Pilat.

L’une, la nationale, dite de Saint-Etienne à Grenoble, que suit la diligence d’Annonay, se dirige directement sur Bourg-Argental et Annonay, en passant par la République et le Grand-Bois.

L’autre, la départementale, qui serre de beaucoup plus près le massif de Pilat, gravit les cimes par Rochetaillée arrive au col du Bessat, qui est presque à la hauteur des sommets de Pilat (1,200 mètres) et de là se ramifie, au lieu de Riorania, d’un côté vers Bourg-Argental, de l’autre vers Saint-Chamond, par la vallée du Gier, tandis que la branche principale continue vers Saint-Julien-Molin-Molette, d’où l’on peut, à volonté, filer directement sur Serrières ou sur Saint-Pierre-de-Bœuf.

Nous avions suivi autrefois la première de ces routes pour aller à Annonay. Il faut à la diligence une bonne heure et demie pour monter de Saint-Etienne à la République, petit hameau de la commune de Saint-Genest-Malifaux, ainsi appelé, bien avant 1848, parce qu’il y avait depuis la fin du siècle dernier une auberge à l’enseigne de la République. En cet endroit, la route est bordée, au sud-est, d’une rangée d’arbres de quatre mètres de largeur. Cette plantation fut faite, vers 1848, par M. Sénéclause, pépiniériste au Bourg-Argental, pour le prix de 25,000 francs, et cela suffit pour modifier l’état de la route. Il y avait là, autrefois, des amoncellements de neige de deux et trois mètres de hauteur, qui rendaient le passage fort difficile, ou même absolument impossible, à la malle-poste de Paris à Marseille, qui suivait cette direction avant l’ouverture des voies ferrées. Depuis lors, la route est toujours praticable, même par les hivers les plus rigoureux ; seulement il faut y mettre parfois plusieurs attelages de bœufs.

Nous aurions pu profiter de la diligence d’Annonay pour aller jusqu’à la République et gagner de là, à pied, le Bessat, puis la grange de Pilat mais il était déjà un peu tard pour réaliser ce projet. D’ailleurs, nous désirions voir, en passant, le beau barrage de Rochetaillée. Bref, il fut convenu que nous partirions le lendemain matin et, qu’après avoir passé la matinée à visiter le barrage, nous irions déjeuner au Bessat et coucher à la grange de Pilat.

Le lendemain, de grand matin, une légère voiture, traînée par deux bons chevaux, nous conduisait au barrage de Rochetaillée.

La route remonte la vallée du Furens. Elle est assez bonne et semée tout le long de détails intéressants pour le touriste comme pour l’industriel. Voici, pour le premier, de beaux noyers dans le fond de la vallée, des châtaigners un peu plus haut, et même, sur le flanc exposé au midi, quelques plantations de vignes. Les châtaigniers, dans cette région, sont beaux, et encore plus dans la vallée du Gier ; mais ils ne paraissent pas donner autant de fruits que les châtaigniers moins branchus et moins touffus des montagnes du Vivarais.

Pour l’industriel, le spectacle n’est pas moins digne d’attention : une foule de petits établissements sont échelonnés le long du Furens ; ici une fonderie de plomb, puis une fabrique d’acier, une buanderie mécanique, une manufacture de canons de fusil (c’est la maison paternelle des Dorian), une fabrique de lacets de souliers, etc., etc. Le bruit des martinets et les grincements du fer contre les meules des aiguiseurs chantent tout le long au touriste leur chanson métallique. Il faut dire que quelques-uns de ces vieux bâtiments paraissent abandonnés : effet naturel de l’association des capitaux, devant laquelle la petite industrie doit partout baisser pavillon. Et cela est très fâcheux au point de vue économique et moral, car les ouvriers se portaient mieux, étaient plus raisonnables et faisaient plus d’économies avant les grandes agglomérations d’aujourd’hui.

Nous aperçûmes, sur l’autre rive du Furens, les restes de l’abbaye de Valbenoite, occupés par une fabrique d’armes et de quincaillerie. Les premiers bâtiments, qui dataient de 1220, furent détruits par un double incendie quelques années avant la Révolution.

La rivière de Furens, dont les eaux ont été utilisées pour le barrage de Rochetaillée, a sa source au Grand-Bois et se jette dans la Loire à Andrézieux, après un parcours de 30 kilomètres ; sa pente est de 32 mètres par kilomètre ; celle du Rhône est seize fois moindre, soit 2 m. 09. Le barrage a été exécuté sur un point où un énorme rocher, planté au milieu de la vallée, ne laissait aux eaux de Furens qu’un étroit passage, en les obligeant à un détour à gauche.

Les ingénieurs ont fermé ce passage au-dessus du Trou d’Enfer et ont élevé les eaux de façon que l’excédent passe à un niveau beaucoup plus élevé, à la droite du rocher, et retombe en belle cascade, en face de la route de Saint-Etienne. Le lit de gauche, resté vide, a été transformé en avenue plantée d’arbres et forme en été un des plus jolis buts de promenade pour les Stéphanois.

La cascade, quand nous passâmes, était à son minimum de volume, soit trente litres à la minute, que le barrage doit aux riverains et qu’il leur fournit sur ses réserves, quand le Furens ne les donne pas naturellement.

Trois inscriptions, placées sur des plaques de marbre, apprennent au touriste tout ce qu’il peut désirer savoir.

La première, placée au bas de la digue de maçonnerie, est ainsi conçue :

SOUS LE RÈGNE DE NAPOLÉON III
Le 28 octobre 1866
A été inauguré ce barrage

S. Excellence M. Béhic étant ministre des travaux publics
Le général conte de Palikao commandant le
4° corps d’armée
S. Exc. le duc de Persigny, président du conseil général
Levert, préfet du département de la Loire
Benoit Charvet, maire de la ville de Saint-Etienne
Vital de Rochetaillée, maire de Rochetaillée
Comoy, inspecteur général des ponts et chaussées
Graeff, ingénieur en chef
De Montgolfier, ingénieur ordinaire

Les deux autres inscriptions sont en haut du bassin, encastrées dans les murs de la maison du garde.

Nous apprenons par l’une que la capacité du réservoir est de 1,600,000 mètres cubes, dont 1,200,000 pour conserver l’eau destinée aux fontaines et aux usines, et 400,000 de vide pour retenir les eaux d’inondation.

Il résulte de la seconde inscription que la dépense totale a été de 1,644,000 fr. dont voici le détail : 902,000 fr. pour le mur du réservoir, haut de 56 mètres, long de 100 mètres, épais de 49 mètres au pied ; 18,000 fr. pour le tunnel supérieur de 65 mètres qui sert à écouler les eaux d’inondation ; 102,000 fr. pour le tunnel inférieur de 185 mètres, par où se fait la prise d’eau pour les tuyaux, robinets, etc.

350,000 fr. pour le canal de décharge ;

177,000 fr. pour les indemnités ;

36,000 fr. pour le petit barrage et les vannes de manœuvre, qui sont à 1,6OO mètres à l’amont.

L’idée du barrage de Rochetaillée remonte à une cinquantaine d’années. En 1836, le maire de Saint-Etienne, M. Peyre-Lallier, avait fait le plan de huit réservoirs à établir sur le Furens. Vers 1844, l’ingénieur Conte-Granchamp se livra à des études plus mûries, que la révolution de 1848 empêcha d’aboutir à un résultat pratique. Ces études furent reprises quand l’avénement de Napoléon III, tirant le pays des agitations d’une politique stérile, permit de s’occuper d’améliorations utiles. Le maire d’alors, M. Faure-Bellon, fit adopter, en 1856, par le conseil municipal, le projet dressé par Conte-Granchamp, assisté de M. Graeff, ingénieur en chef, et de M. Deloche. L’exécution des travaux fut confiée à M. de Montgolfier ; ils commencèrent en 1861 et durèrent cinq ans.

Le petit barrage du Pas-de-Riot, antérieur à celui de Rochetaillée, est à 2,200 mètres en amont de ce dernier.

Outre l’eau du barrage, Saint-Etienne fait venir du Bessat son eau de source, prise au Grand-Bois, sur les territoires du Bessat et de Tarentaize. En parcourant les abords du barrage, nous rencontrâmes deux grandes dalles de granit, servant d’œil aux conduits souterrains de ces sources, et sous lesquelles on entendait l’eau couler bruyamment. Ces sources suffisent à Saint-Etienne en temps ordinaire, mais le barrage est là pour fournir un supplément au besoin. Le garde du barrage correspond par le téléphone avec Saint-Etienne.

Le bassin est peuplé de truites. On a remarqué que, depuis son établissement, l’hirondelle de rocher est venue s’établir aux environs, et l’on prétend même que la loutre a fait son apparition.

Le Pilat a deux autres barrages, l’un à la Valla et l’autre à Ternay, qui ne font pas moins d’honneur aux habitants de Saint-Chamond et d’Annonay que celui de Rochetaillée aux habitants de Saint-Etienne.

Les deux derniers, inspirés sans doute par l’exemple de Rochetaillée, paraissent avoir reçu tout au moins une forte impulsion d’une lettre de Napoléon III du 19 juillet 1850, où le souverain, frappé des inondations de cette année, et cherchant à en prévenir le renouvellement, faisait les réflexions suivantes :

« Tout consiste à retarder l’écoulement des eaux. Le moyen d’y parvenir est d’élever, dans tous les affluents des rivières et des fleuves, aux débouchés des vallées et partout où les cours d’eau sont encaissés, des barrages qui laissent dans leur milieu un étroit passage pour les eaux, les retiennent lorsque leur volume augmente et forment ainsi, en amont, des réservoirs qui ne se vident que lentement. »

Cette idée si simple et si féconde, qui n’était pas sans doute bien nouvelle, puisque les Romains avaient déjà construit des barrages, mais qui, dans la bouche du chef de l’Etat, devait frapper davantage les esprits, surtout après les récents désastres, fut, dans tous les cas, soigneusement recueillie par un des plus grands industriels d’Annonay ; c’est, en effet, à l’initiative de M. Etienne de Canson qu’est due l’exécution du barrage du Ternay, le second, en date, des barrages du Pilat, mais non le moins important, car s’il est moins profond que celui de Rochetaillée, il présente, en revanche, une superficie beaucoup plus grande (environ 30 hectares) et contient près de trois millions de mètres cubes d’eau.

On a calculé que les sources du Pilat pouvaient donner ensemble, pendant les plus basses eaux, un minimum de 39,000 mètres cubes par jour.

Lord Socrate ne dissimula pas son admiration pour le beau travail du barrage de Rochetaillée.

– Ah ! dit-il, si les Français s’attachaient à ne remporter que des victoires de ce genre, qui pourrait rivaliser avec eux !

– Heureusement pour les nations rivales, dis-je, la méchante fée qui préside à toutes les naissances, jalouse sans doute des avantages dont les bonnes fées avaient doté la France, lui a dit : Tu auras toutes les qualités ; tu seras intelligente, brave, laborieuse ; mais tu ne profiteras de rien, car tu aimeras la politique avant tout, et tu perdras la plupart de tes avantages en bavardages inutiles.

Chabourdin avait grande envie de célébrer, à propos des barrages, la République et le grand Léon, mais il s’abstint, en réfléchissant, sans doute, que tous les barrages du Pilat remontaient à l’époque du tyran.

Miss Diana nous avait quittés pour s’installer au bord du barrage, d’où elle suivait, avec un intérêt marqué, les évolutions des hirondelles. Oh ! les jolies bêtes ! avec quelle grâce et quelle légèreté elles accomplissent la mission que Dieu leur a donnée de purger l’air des moucherons !

L’enfant du garde apporta à la jeune fille un de ces oiseaux. Miss Diana fit poser un moment l’enfant, tenant dans ses mains l’oiseau, dont la tête fine et l’air effarouché indiquaient assez l’ennui d’une captivité inattendue. Quand elle eut terminé son dessin, elle caressa doucement l’oiseau, le contempla encore un moment pour en bien saisir la physionomie, puis, ayant donné une pièce de monnaie à l’enfant, lui fit remettre la prisonnière en liberté. L’hirondelle s’envola avec un petit cri de joie.

Miss Diana avait pour les oiseaux une affection particulière, au moins pour les oiseaux innocents, ceux qui ne mangent pas les autres. Elle ne comprenait pas comment il y avait des hommes assez cruels pour leur faire la chasse.

– Je vous avoue, dit Chabourdin, que pour ma part je le comprends très bien, car enfin, nous sommes en état de légitime défense si nous ne mangions pas les bêtes, ce sont elles qui nous mangeraient.

– C’est là, dis-je, une très grosse question que les cuisiniers et le bon sens pratique ne résoudront jamais de la même façon que les jeunes filles sentimentales ; mais en la restreignant aux hirondelles, nous pouvous tous être d’accord, car l’hirondelle, outre qu’elle serait un mauvais mets pour nos tables, est pour nous, non pas un concurrent malencontreux, mais un précieux auxiliaire, puisqu’elle nous débarrasse d’une foule d’insectes incommodes ou malfaisants.

Du barrage on peut, en quelques minutes, si l’on est pressé, rejoindre directement la route du Bessat au village des Essartines ; mais, ayant toute une grande et belle journée devant nous, point n’était besoin de faire cette ascension que miss Diana proposait.

– Ce n’est pas étonnant, me souffla le commis-voyageur, elle est si maigre !

– Et vous êtes si gras !

– Elle est fort gentille, néanmoins !

Chabourdin allégua hypocritement le plaisir qu’aurait lord Socrate à visiter Rochetaillée. Nous reprîmes donc notre voiture au bas du barrage pour aller faire le tour de Rochetaillée. Ce village est assis sur une arête de rocher qui fait de cet endroit la limite précise des deux bassins du Rhône et de la Loire, en sorte qu’en se mettant à cheval sur telle muraille que montrent les indigènes, on a un pied sur le versant océanique et l’autre sur le versant méditerranéen.

On voit à Rochetaillée, sinon les restes du camp problématique de Labiénus, au moins les ruines d’un château féodal avec trois tours et deux portes. Sur l’une des portes est écrit Ostium non hostium, ce qui veut dire une porte qui ne s’ouvre pas à l’ennemi. On en disait autant de Metz. Et quant à Rochetaillée, ses murs démolis enseignent la modestie aux faiseurs d’inscriptions futures.

Ce château avait pour assise une curiosité géologique, c’est-à-dire une lentille de quartz opaque de 15 à 25 mètres de puissance. Est-il étonnant que, bâti sur une pierre à fusil, il ait eu des destinées belliqueuses ? Après avoir appartenu successivement aux Lavieu, seigneurs de Jarez, aux Lignières et aux Montrond, ce château appartenait, à l’époque des guerres de religion, à Jean d’Apchon qui, en 1573, épousa Marguerite de Luppé, la dame chantée par Anne d’Urfé, sous le nom de Carite, dans un volume de poésies inédites que possède la Bibliothèque nationale. Marguerite, devenue veuve, aurait volontiers accepté son fidèle adorateur, mais ses parents l’obligèrent à épouser un Bressieu. Naturellement les deux rivaux se trouvèrent dans des camps opposés, le Bressieu pour le roi de Navarre et Anne pour la Ligue. Ce dernier prit sa revanche et emporta d’assaut le château de son rival le 30 juin 1589. Plus tard, ce brave Anne se fit moine et mourut en 1621.

Miss Diana prit un vif intérêt à cette histoire romanesque.

Malgré ses mésaventures, le château de Rochetaillée avait traversé sans encombre la Révolution ; mais il est tombé, il n’y a pas longtemps, sous les coups d’une bande noire qui l’a vendu en détail aux maçons et aux paysans qui avaient besoin de matériaux pour bâtir (1).

Ici un souvenir personnel : nous nous voyons, comme dans un rêve, passant à Rochetaillée, il y a quelques trente ou quarante ans, en touriste poudreux. C’était par une belle soirée d’automne que nous fîmes notre entrée peu solennelle dans ce village, en quête d’une auberge. Celle où nous frappâmes, la seule croyons-nous, de l’endroit, était de fort modeste apparence. Quand on vint nous ouvrir, nous nous attendions à l’apparition d’une maritorne quelconque, laide et grossière, et nous fûmes agréablement surpris de trouver une jolie fille dont le frais visage, le ton de voix et l’air honnête contrastaient heureusement avec le milieu que le sort lui avait donné. Nous trouvâmes le dîner bon et la chambre propre et, après avoir écrit nos impressions de la journée, nous nous endormîmes en rêvant des héroïnes de l’Astrée. Heureux temps où la jeunesse fait trouver toutes les femmes jolies et tous les dîners bons !

Cette fois nous ne fîmes que traverser le village. Le cocher, profitant des loisirs de la montée, nous raconta la générosité du baron de Rochetaillée qui, voulant au moins assurer le nécessaire aux indigents de son village, leur ouvre un compte chez son boulanger et son boucher.

– En voilà un, au moins, dit l’Anglais, qui a compris la question sociale ; car si chaque riche en faisait autant dans son milieu, elle se trouverait toute résolue.

Ce généreux bienfaiteur de la contrée est mort, je crois, l’année dernière.

Le lac du barrage miroitait là-bas. Il en montait comme une vapeur légère qui allait se perdre dans les arbres du Grand-Bois. Ce phénomène donna à Chabourdin l’idée de déployer sa science en nous expliquant la théorie du Circulus éternel des eaux terrestres qui, après avoir coulé du sommet des montagnes, y remontent sous la forme de nuages pour y continuer leur rôle rafraîchissant et fécondant.

– Tout cela, dit l’Anglais, est fort bien imaginé mais savez-vous pourquoi le nuage monte et pourquoi l’eau descend ?

– Oui, c’est en vertu des lois de la pesanteur, découvertes par un de vos plus illustres compatriotes !

– Des lois ! En Angleterre, qui dit loi suppose un législateur. Est-ce qu’il n’en est pas de même en France ?

Chabourdin se mordit les lèvres. Il s’embrouilla en cherchant à expliquer que ces lois étaient inhérentes à la force même des choses, sans que cela impliquât l’existence d’une personnalité supérieure et toute puissante, placée en dehors du monde matériel.

– Qu’appelez-vous la force des choses ? dit lord Socrate.

– C’est la Nature.

– Est-ce qu’il ne serait pas plus simple, dit miss Diana, de dire que c’est le bon Dieu ?

– Ecoutez, messieurs, dis-je en intervenant, nous reprendrons le débat là-haut, sur les sommets du Pilat. Comme la nature y est, dans sa simplicité grandiose, encore plus visible et plus éloquente qu’ici, nous demanderons à cette aimable autant que mystérieuse personne d’éclaircir le malentendu qui nous divise, et peut-être nous livrera-t-elle des secrets qui nous mettront d’accord…

– … Si l’accord, murmura l’Anglais, peut exister quelque part entre les hommes.

  1. Mulsant, Souvenirs du mont Pilat, t. 1, p. 107.